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mardi 12 juin 2018

Roche intrusive (pyroxénite) dans le calcaire ordovicien, à Hull ?


Calcaire ordovicien de la formation Black River (Trenton), promenade du Lac-des-Fées, Hull (Gatineau), QC. Un calcaire grossier (à clastes et bioclastes) contient un élément flottant d'un lit plus fin. Photo 8 déc. 2013.


Résumé

On aurait trouvé une pyroxénite intrusive dans un calcaire ordovicien de la plate-forme du Saint-Laurent, à Hull, QC. La présence de cette pyroxénite dans cet horizon stratigraphique est étonnante (si confirmée).


Le sol et le sous-sol de l’Outaouais sont bien connus. 

On peut comparer la région à un gâteau. Découpez-en un morceau, vous verrez de bas en haut, sur la tranche (MA = millions d'années) :


  • Le gâteau lui-même (partie la plus substantielle) figure ici le Bouclier canadien, formé de roches métamorphiques et plutoniques âgées de plus d’un milliard d’années ;
  • Le glaçage, en surface, incomplet ou entamé, correspond aux sédiments de la plate-forme du Saint-Laurent (grès, calcaires et schistes) datant du Cambrien tardif (515 -485 Ma) et de l'Ordovicien (485-444 Ma) ;
  • Le tout est saupoudré de sucre en poudre pour tenir lieu de la mince couverture de sédiments meubles glaciaires et d’argile de la mer de Champlain qui recouvre le gâteau et la glaçage.


Voilà de quoi notre gâteau est fait.

Pour être complet, il faudrait compter avec les dykes d'une carbonatite liée aux Montérégiennes qui recoupent le calcaire ordovicien, à Ottawa (carrière Blackburn), datant de 110-120 Ma (Hogarth et al., 1988). (Intrusion minuscule.) Toutes les autres roches intrusives de l'Outaouais et au-delà sont antérieures au dépôt du calcaire : dykes de diabase qui recoupent le Bouclier (600 Ma) ; pluton de Grenville-Chatham (530 ma), toujours dans le Bouclier, etc.

Pour les dates, voir mon billet du 5 déc. 2015, « Tableau des temps géologiques : Gatineau et ses environs ».

Tout enrichissement de la stratigraphie, toute irruption d'un nouvel ingrédient dans le gâteau serait une révolution.

Or, voilà que je tombe par hasard sur un rapport de forage vieux de vingt ans qui fait état d’une roche intrusive (une pyroxénite, roche plutonique mafique) dans le calcaire ordovicien, à Hull (Les laboratoires Gatineau, 1998).

Qu’est-ce que fait une pyroxénite à cet endroit ? Comment a-t-elle pris place dans le calcaire ? À quelle suite ou série plutonique l'assimiler ?

Selon le rapport, une étude des sols et du roc entre la rue Demontigny et la promenade du Lac-des-Fées rédigée en vue de la réalisation du futur boulevard des Allumettières (axe McConnell-Laramée), le socle rocheux du secteur est constitué de calcaire à grain fin de la formation Black River (Trenton), interlité de calcaire argileux et de shale argileux. Rien que du banal, rien que de l'attendu. Rien pour faire sursauter. Sauf cette roche dure, cet « intrusif verdâtre » rencontré dans la partie partie supérieure d'un forage (forage F4), entre 1,25 m à 1,50 m de profondeur. Le contact intrusif-calcaire est bien défini, cependant, l'orientation du contact n'est pas définie.

Le forage F4 a été réalisé à l'angle des rues Demontigny et Laramée (cette dernière absorbée depuis par le boulevard des Allumettières). En lame mince, l'intrusif se révèle équigranulaire (grains 0,5-1,0 mm), et est constitué à 75 % d'orthopyroxène (hypersthène) et de clinopyroxène (augite) en proportions égales. Le 25 % restant est composé de quartz, de calcite et de minéraux argileux [altérés ?] « Nous sommes donc en présence d'une pyroxénite. » (p. 13)

Le rapport de forage, rédigé avant l'examen de lame mince, est moins affirmatif. Il signale, à la profondeur de 1,25 m à 1,50 m sous la surface : « Calcaire vert grenu, minces horizons dolomitique (sic) (présence de cristaux). » La nature de la roche verte n'avait donc pas d'emblée été reconnue. Mais une identification sur le terrain est toujours sujette à caution et peut être revue après plus ample examen en laboratoire.

Si cette roche est bien ce qu'en disent les Laboratoires Gatineau, il est étonnant que sa découverte n'ait pas fait plus de bruit.  

Quelle est cette pyroxénite ? À quelle suite magmatique l'assimiler ?

La présence de cette pyroxénite dans notre calcaire ordovicien n'est pas une impossibilité ; simplement, telle chose n'a jamais été observée. Comme pour faciliter les choses, les Laboratoires Gatineau ne semblent plus exister. Je doute que des échantillons aient été conservés.


Références

  • Donald D. Hogarth, Peter Rushforth, Robert H. McCorkell, 1988 - « The Blackburn Carbonatites, Near Ottawa, Ontario: Dykes With Fluidized Emplacement. » Canadian Mineralogist, vol.26, pp. 377-390. http://rruff.info/doclib/cm/vol26/CM26_377.pdf
  • Les Laboratoires Gatineau, 1998. Étude de caractérisation des sols et du roc : boulevard St-Laurent - Laramée, Hull - secteur DeMontigny au Lac-des-Fées. Projet 20-6672-8385-A - Rapport final. Gouvernement du Québec, Ministère des Transports.


lundi 6 novembre 2017

Marbre, gabbro et mégacristaux, autoroute 50, Qc


Autres billets sur l'autoroute 50 : lien.

Fig. 1. - Gabbro noir recoupant un marbre grisâtre : le marbre a réagi à son tour en rompant le gabbro et en s'injectant dans les cassures (à droite).


Résumé

Un des corps de gabbro le long de l'autoroute 50, entre Buckingham et Grenville, Qc. L'intrusion du gabbro dans un marbre a généré des porphyroblastes de silicates atteignant 20 cm (diopside, scapolite, etc.. Les gabbros de l'A50 recoupent des paragneiss, des marbres et des orthogneiss de la province de Grenville, Bouclier canadien, âgés d'entre 1,0 et 1,2 milliards d'années.
Localisation
Auroroute 50, sortie chemin Kilmar Sud ; angle chemin Kilmar et rue Rourke.
Photos
12 avril 2015
Autres billets sur l'autoroute 50
Lien.


Intérêt géologique et minéralogique. - Gabbro recoupant un marbre grisâtre ; le gabbro lui-même est recoupé par le marbre mobilisé par son intrusion. Le gabbro est par ailleurs recoupé par des filons de granite et par une faille oblique où la roche devient friable. La réaction à hautes températures et à hautes pressions entre le gabbro et le marbre a généré dans ce dernier des silicates de calcium divers (porphyroblastes de 20 cm). 

Philippe Belley (2017) a exploré le site entre 2006 et 2010, durant la construction de l'autoroute et la reconfiguration des chemins proches. Les affleurements disponibles alors n'étaient pas les mêmes que ceux existant lorsque je l'ai visité en avril 2015. Philippe signale des cristaux de clinopyroxènes verts de plus de 20 cm, de la titanite brun rougeâtre de 3 cm, de la scapolite xénomorphe de 15 cm, du feldspath potassique de 15 cm et du graphite massif. Mes propres observations ajoutent à cette liste de l'apatite turquoise xénomorphe

Philpotts (1976) a cartographié la région. Sa carte au 1/12 000 est fidèle à ce qui s'observe sur le terrain. 


Références



  • Philippe M. Belley, Michel Picard, Ralph Rowe et Glenn Poirier, 2017 — Minerals of Highway-50, Grenville to Pointe-Au-Chêne, Québec. Lien : https://www.mindat.org/a/hwy50grenville
  • Bourdeau, J.E. — 2009. A mineralogical investigation of a blue-calcite-bearing calc-silicate assemblage from Grenville, QC. B.Sc. Thesis, University of Ottawa.
  • Philpotts A.R., 1976 — Canton de Grenville (partie sud-est). MRNQ, avec carte 1803 au 1/12 000.


Fig. 2.- Le gabbro avec des enclaves du marbre blanc qu'il recoupe.



Fig. 3. - Lentille de calcite dans le gabbro (enclave du marbre encaissant ou marbre mobilisé par l'intrusion du gabbro ?). Des cristaux de pyroxène vert (diopside ?) parsèment la calcite. Si vous faites coexister à hautes températures et hautes pressions des silicates (gabbro) et du carbonate (marbre), vous obtenez très logiquement des silicates de calcium (par ex. des Ca-pyroxènes).



Fig. 4. - Gros plan sur les cristaux de pyroxène vert de la fig. 3. La tête du marteau a 13 cm de long.


Fig. 5. - Calcite saumon, pyroxène vert bouteille, apatite turquoise, sphène (titanite) brune (?) à gauche de la tête du marteau, dans le pyroxène. Tout pour la joie du collectionneur de minéraux (que je ne suis pas).


Fig. 6. - Un filon de granite massif recoupe à son tour le gabbro.


Fig. 7. - Une faille verticale recoupe le gabbro et rend la roche friable.

vendredi 18 décembre 2015

Sommaire tectonique du sud-est de l'Ontario


1. Gneiss droits horizontaux de la zone de cisaillement de Maberly, Maberley (Ontario), près de la United Church ; 44.837107,-76.538755. Il s'agit de la MSZ (Maberly Shear Zone) des documents reproduits aux fig. 2 et 3. Photo sept. 2013. (Voir ces anciens billets.)


D'autres que moi dressent des tableaux des temps géologiques (voir mon billet du 5 déc. 2015). Par exemple Magnus et Easton (2015).

Leur Sommary of tectonic events [...] of Southeastern Ontario (fig. 2 et 3 ; les photos 1 et 4 sont de moi) déborde des limites de la province et pourrait servir, avec quelques retouches, à décrire l'Outaouais québécois. La géologie se fiche un peu de nos frontières, elle était là avant nous, et entend bien que l'on respecte sa primauté.

Ce Sommaire est extrait d'une série de trois cartes publiées par ces auteurs qui tentent, par leurs travaux, d'entrevoir le Précambrien de l'est de l'Ontario au travers des couches paléozoïques de la plate-forme du Saint-Laurent. Je n'en dis pas plus, ce n'est pas le sujet premier de ce billet, mais ces trois cartes méritent un coup d'œil attentif. J'y reviendrai, mais rien ne vous interdit d'y aller voir par vous-même immédiatement (références à la fin du billet, les cartes sont téléchargeables gratuitement).

Mais, auparavant, vous pouvez vous s'amuser à comparer le Sommaire tectonique du sud-est de l'Ontario de Magnus et Easton avec mon Tableau des temps géologiques (billet du 5 déc. 2015, lien plus haut).

Il ne faut pas trop se scandaliser des différences entre le Tableau et le Sommary. Ces documents n'ont pas été rédigés dans le même esprit et certains événements s'étant déroulé sur plus de cent millions d'années, il subsiste un flou inévitable dans leur démarrage discret et leur arrêt graduel. Rome ne s'est pas faite en un jour et l'océan Atlantique ne s'est pas ouvert non plus en une saison.

Mais bon, pour ceux qui, comme moi, aiment les tableaux et les références, voici un billet un billet à leur goût. Beaucoup de données, peu de blabla.

Je me tais, donc.


2. Tableau de Magnus et Easton (2015). Je n'ai pas reproduit la dernière colonne (les références), ça aurait étiré ce tableau déjà trop long, reportez-vous au document original. Cliquer sur l'image pour l'agrandir.


3. Carte tirée Magnus et Easton (2015) pour situer quelques-unes des formations dont il est question dans leur Sommary.


4. Gabbro leucocrate de la zone de cisaillement de Maberly (cf. fig. 1). Un filon felsique clair ondule dans la masse du gabbro. Photo sept. 2013.


Références

  • Preliminary Map P.3791. Precambrian Geology of Eastern Ontario Interpreted from Aeromagnetic and Compiled Geological Data—Northwest Sheet; by S.J. Magnus and R.M. Easton, scale 1:100 000, colour. $19.00.
  • Preliminary Map P.3792. Precambrian Geology of Eastern Ontario Interpreted from Aeromagnetic and Compiled Geological Data—Northeast Sheet; by S.J. Magnus and R.M. Easton, scale 1:100 000, colour. $19.00.
  • Preliminary Map P.3793. Precambrian Geology of Eastern Ontario Interpreted from Aeromagnetic and Compiled Geological Data—South Sheet; by S.J. Magnus and R.M. Easton, scale 1:100 000, colour. $20.00.

lundi 30 mars 2015

Gabbro pincé


Version longue d'un billet écourté (13 nov. 2014).


Zone de cisaillement de Maberly, route 7, à l'est de Maberly (Ontario), 12 octobre 2014.


Lentille de gabbro à hornblende pincée dans des gneiss droits (détail). Les cristaux de hornblende (en noir) ont l'allure de têtards glissant les uns sur les autres. 


Vue avec arm's length de recul, comme on dit (visée vers l'E) :




Deux dernières photos : vues de l'extrémité opposée du même affleurement (visée vers l'W). Certains rubans, étirés et comprimés par les forces tectoniques, se pincent et s'évasent tandis que d'autres conservent des bords relativement parallèles.






Élégance des courbes.

lundi 13 octobre 2014

Gabbro pincé




Lentille de gabbro à hornblende pincée dans des gneiss droits (détail). Les cristaux de hornblende (en noir) ont l'allure de têtards glissant les uns sur les autres.
Zone de cisaillement de Maberly, route 7, à l'est de Maberly (Ontario), 12 octobre 2014.



Version (un peu plus) longue, 30 mars 2015.

vendredi 1 novembre 2013

Kingston et les formes de Gaïa



Discordance Protérozoïque/Paléozoïque du lac Beauchamp, à Gatineau (Québec). (Photo nov. 2010) A) Granite gneissique ; plus d'un milliard d'années (province géologoque de Grenville, Bouclier canadien) ; B) Discordance d'érosion ; C) Grès de Nepean ; environ 500 millions d'années (plate-forme du Saint-Laurent). Voir ce billet (même blogue) pour plus de détails.


Résumé
On traite encore du Bouclier canadien (plus d'un milliard d'années dans notre secteur), des sédiments marins, grès et calcaire, qui l'on recouvert il y a 500 millions d'années. À certains endroits (nommés ici), le contact (discordance) entre le socle et la couverture sédimentaire est visible. On peut alors observer les ondulations du continent tel qu'il était il y a un demi milliard d'années.
Localité
Au NE de Kingston (Ontario), autoroute 401, 200 m à l'ouest du viaduc de la route 15

44.288108,-76.432368
Autres localités cités : Kanata, ON, et le lac Beauchamp, Gatineau, QC (liens dans le texte).


Au fil des mois, plusieurs billets sur la discordance Protérozoïque/Paléozoïque du lac Beauchamp, à Gatineau, ainsi que sur celle, de même nature mais un peu dissimulée, de Kanata, à Ottawa, se sont accumulés dans le blogue.

Voici un lien vers un article signé Herb Helmstaedt (Frontenac News, hiver 2011, no 59) sur une discordance similaire au NE de Kingston (Ontario), sur la 401, à l'ouest de la route 15. (Affichez le no du Frontenanc News, faites défiler jusqu'à l'article «What’s in a Name? The Frontenac Arch», ou utilisez le sommaire de la colonne à gauche de l'écran.)

Gatineau, Kanata ou Kingston, c'est toujours la même discordance que l'on suit, celle qui souligne le contact entre le socle précambrien du Bouclier canadien (province de Grenville), vieux de plus d'un milliard d'années, et les sédiments marins de la plate-forme du Saint-Laurent qui ont commencé à s'y déposer il y a environ 500 millions d'années (Cambro-ordovicien ; Paléozoïque). C'était en des temps plus heureux, alors que notre continent chevauchait l'équateur.

À Gatineau et à Kanata (dans la basse vallée de l'Outaouais), les eaux, d'abord peu profondes, ont déposé des sables (grès du Cambro-ordovicien) puis, à mesure qu'elles s'approfondissaient et gagnaient sur le continent, sur le bouclier précambrien, le calcaire (à l'Ordovicien) s'est précipité et accumulé.

À Kingston, les choses se passées un peu différemment, et plus tardivement. La mer, avant d'atteindre l'emplacement de la future Kingston, a dû être assez haute pour franchir un obstacle, l'arche de Frontenac (le court bras du Bouclier canadien qui retient les Adirondacks ; voir l'article de Helmstaedt pour des cartes et de plus amples explications). Un fois cette barrière surmontée, elle a déposé directement sur le socle précambrien le calcaire (Ordovicien moyen, vers 470 Ma) que nous observons près de la 401, faisant ainsi l'économie de l'étape du grès de Nepean.



Discordance Précambrien/Paléozoïque, autoroute 401, à l'est de Kingston (Ontario), 200 m à l'ouest de la route 15. O : calcaire de l'Ordovicien moyen (plate-forme du Saint-Laurent, 470 Ma) ; Pc : granite du Précambrien, province géologique de Grenville, Bouclier canadien (plus d'un milliard d'années) ; ligne blanche : discordance (dépôt de l'O sur le Pc) représentant la surface du contient il y a un 470 millions d'années ; on voit que les couches sédimentaires épousent le relief du Bouclier. La discordance est dans un îlot ceinturé par la 401 et une bretelle d'accès.


Dans les trois cas, à Kingston, près du Saint-Laurent, comme dans la basse vallée de l'Outaouais, la discordance épouse la forme du relief d'il y a 500 millions d'années. La ligne blanche visible sur la deuxième des photos qui suivent représente donc un relief vieux d'un demi milliard d'années, le continent tel qu'il était il y a un demi milliards d'années.

Si on ne s'étonne pas que les roches subsistent si longtemps, voir les formes de Gaïa surgir intactes du passé lointain aurait tendance à m'émouvoir quelque peu.





Partie est de l'affleurement de la 401. La roche noire qui recoupe le granite rouge est probablement un dyke de diabase du faisceau de Kingston, âgé de plus de 900 Ma. Ces dykes se caractérisent par leur direction NW à N.


Ajout de dernière minute.

Autre post sur le même sujet : «A Billion Years by the Side of the Road», par Doug Bond.

samedi 13 octobre 2012

Hors sujet : Mars, t'sé veux dire ?


«Jake Matijevic», rocher martien qui fait parler de lui. Source : © NASA. 
Pour les raisons qui justifient cet étrange surnom donné à une roche, voir l'inévitable Wikipedia.
Ajout après mise en ligne. –  Les vacuoles qui grêlent la surface de la roche sont peut-être les traces des bulles de gaz qui s'échappaient de la lave à l'état fluide. Il pourrait s'agir aussi d'alvéoles creusées par l'érosion éolienne. Le bloc repose sur une semelle amorphe (croûte vite refroidie ?) tandis que, sur son flanc droit, les vacuoles/alvéoles ont une structure allongée nettement orientée. Je n'ose pas trop en dire, de peur de gaffer, je suis en terrain inconnu...


Le journalisme scientifique atteint des apogées. Déjà qu'il avait été délesté d'une partie de son vocabulaire (voir mon billet du 29 septembre, «Poudingue sur Mars»), voici qu'il renonce à l'idée même de nommer les choses. Témoin cet extrait d'une dépêche de l'AFP reprise par Le Monde à propos de la mission Curiosity sur Mars :

«La première roche analysée sur Mars par deux des instruments du robot américain Curiosity a une composition inhabituelle comparativement à ce qui était connu jusqu'alors sur la planète rouge, ont indiqué, jeudi 11 octobre, des scientifiques de la mission. La composition de cette roche de la taille d'un ballon de football ressemble à celles – rares mais connues sur la Terre – qui proviennent de volcans.»

«"Cette roche est très similaire dans sa composition chimique d'un type de rocher trouvé dans de nombreuses régions volcaniques", a expliqué [...]»

Inutile de lire le reste de l'article, vous n'en saurez pas plus sur ces inhabituelles roches martiennes, similaires à des rares roches volcaniques que l'on retrouve dans de «nombreuses régions volcaniques» sur Terre». Des roches rares, mais néanmoins fréquentes, il y a là comme un paradoxe. C'est à y perdre son latin, pardon, son martien !

Ces roches «qui proviennent de volcans» doivent bien avoir un nom : carbonatite (un peu rare), trachyte (pas rare) ou basalte (très fréquent), etc.

Nous voilà malgré tout instruits de l'essentiel : on a trouvé sur Mars une roche ayant certaines carectéristiques qui la font ressembler à des roches sur Terre qui ont certaines caractéristiques, les mêmes, mais on ne saura pas lesquelles.

C't'une roche, t'sé veux dire ?

Supplément d'informations
Selon la NASA (c'est moi qui souligne).
«On Earth, rocks with composition like the Jake rock typically come from processes in the planet's mantle beneath the crust, from crystallization of relatively water-rich magma at elevated pressure.

"Jake is kind of an odd Martian rock," said APXS Principal Investigator Ralf Gellert of the University of Guelph in Ontario, Canada. "It's high in elements consistent with the mineral feldspar, and low in magnesium and iron."»

Selon SPACE.COM (c'est moi qui souligne).

«Jake appears to have higher concentrations of elements such as sodium, aluminum and potassium, and lower concentrations of magnesium, iron and nickel, than other igneous rocks studied on Mars.

While previously unknown on Mars, this type of chemical composition is seen in a rare but well-studied class of rocks on Earth. On Earth, such specimens are found on oceanic islands such as Hawaii and in other places. They are thought to form when interior rocks melt to form magma, which then rises toward the surface. As it rises, it cools, and parts of the material crystalize, preferentially selecting some elements while leaving a remainder of liquid magma that is enriched with the left-behind chemicals.»

C'est déjà mieux, on en sait un peu plus. On peut déjà exclure le terme mafique des roches ignées (riches en magnésium et en fer), tel le basalte, et aller vers les roches felsiques (riches en feldspath et en silice), bien dotées en potassium et en calcium, telle la rhyolite (forme effusive du granite). En fait, la composition de la roche martienne (passages en gras ci-haut) correspond exactement à la composition typique des roches felsiques. Ça ne correspond pas du tout à celles des laves mafiques d'Hawaï, mais il y a peut-être ici des nuances qui m'échappent.

Mais qu'est-ce qui les empêche de nommer cette foutue roche martienne dont ils connaissent la composition et des exemples terrestres ?

Celui qui conçoit bien s'exprime aisément et n'a pas besoin de se faire tirer un à un les vers du nez pour être compris. Et quand le message est clair, on a moins envie de s'en prendre au messager...

Zéro en communication.

dimanche 27 mai 2012

Hors sujet : combien de jours dans un mois ?


Courte pause, retour dans un mois (sidéral ou synodique, je me garde une certaine marge de manœuvre).

Je reste disponible pour recevoir les commentaires des lecteurs et tenter de répondre à d'éventuelles questions.

Activité réduite, donc, juste le temps de faire autre chose.

Et, accessoirement, de repenser l'allure de ce blogue.



Carrière Dibblee, parc de la Gatineau (20 mai 2012).
Dyke de diabase de l'essaim de Grenville (590 millions d'années)

Vaste question !... 
(Graffiti anonyme sur la diabase.)