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dimanche 3 novembre 2013

Mine Blackburn à Cantley (ajout)


Mine Blackburn, à Cantley, QC. Calcite rose et apatite turquoise. Le coupe-vent bleu fait ce qu'il peut pour s'harmoniser avec la trouvaille. (Photo 3 nov. 2013.)


Résumé

L'auteur entonne le couplet convenu sur le temps qui passe et la destruction des paysages familiers.
Localisation
Ancienne mine Blackburn (mica et apatite), chemin Blackburn, à Cantley (Québec), au nord de Gatineau.
45.555575,-75.791245
Pour en savoir plus : voir le billet du 7 mars 2012 (exploitation du mica (phlogopite) et de l'apatite). Voir aussi le billet «Skarns : article recyclé», 16 février 2012.



La mine Blackburn, connu aussi sous le noms de mine Vavasour, et ouverte en 1878 à Cantley, fut déjà la plus importante mine de mica en occident. (Voir coupes et plan plus bas.) En 1881, 500 personnes travaillaient, à la mine elle-même ou aux ateliers de traitement du mica. C’est aussi la plus profonde des mines de la région : une des tranchées atteignait 200 m de profondeur. La mine cessa ses activités en 1964. Sa fermeture mit un terme à l’exploitation du mica en Outaouais. (Tiré du billet «Histoire minière de l'Outaouais II», 7 mars 2012, lien plus haut.)

En vingt ans, j'ai visité la mine Blackburn à cinq reprises tout au plus.


Mine Blackburn : géologie (Hogarth, 1972) ; couleurs : votre serviteur. La «roche à silicate calcique» est une métapyroxénite, ou un skarn.


La première fois, c'était au début des années 1990. La mine était abandonnée depuis presque trente ans. Il suffisait de s'enfoncer dans le bois pour découvrir des tranchées étroites profondes de plusieurs mètres. J'ai jugé prudent de ne pas tenter la chance, craignant autant la descente que la remontée qui s'ensuivrait(?). Un énorme chien fou avait couru de loin pour... jouer avec moi. Très mauvais chien de garde qu'il faudrait dénoncer à ses propriétaires.

Lors de la seconde visite, dans la seconde moitié des années 1990, j'ai trouvé les tranchées comblées. Il restait les fondations des bâtiments de la mine (peut-être même une cabine, ma mémoire est floue sur ce point). Une vaste surface était couverte par des débris de roches roses (calcite) et vertes (pyroxénite) provenant sans doute des haldes*. Un collectionneur de cristaux ou de roches pouvaient encore espérer rapporter quelque chose de son expédition.

* Haldes : tas de roches stériles rejetées durant l'exploitation d'une mine.

J'y suis retourné à deux reprises en juin et juillet 2001, explorer les environs et faire des relevés aux pas et à la boussole.

Novembre 2013, le site est en développement : les rues sont tracées, les terrains vendus ou déjà construits. Les haldes de la mine servent de remblais aux rues et aux entrées de garage. Pour l'instant, la collecte de minéraux est encore possible, les observations aussi, mais, bientôt, tout sera pelousé et asphalté.

Le long du chemin Blackburn, les vieilles demeures campagnardes, les premiers pavillons de banlieue qui datent déjà de plus d'une génération ont été rejoints par de démesurées demeures de briques rosâtre. Les chiens sont tenus en laisse.

On n'arrête pas le progrès, l'étalement urbain ou l'oubli. Chacun son histoire, chacun ses regrets.


Galeries de la mine Blackburn, modifié de Van Velthuizen (1998).


Références

  • Hogarth D.D., Moore J.M., dans : Baird D.M. (compil. et édit.), 1972 — Géologie de la région de la Capitale nationale. Commision géologique du Canada, livret guide bilingue, 24e congr. géol.
  • Van Velthuizen, J., 1998, The Gow (Blackburn Mine, Cantley, Québec). Gratitude Press Canada, 214 p., reliure spirale.


«Roche à silicate calcique» verte (ici, du pyroxène) recoupée par un filon de calcite rose (cf. carte géologique plus haut). (Photo 3 nov. 2013.)


Livrets de mica (phlogopite) large de plus de 30 cm dans une masse de calcite semblable à celle de la photo plus haut. (Photo 3 nov. 2013.)


Plis dans le gneiss à biotite (cf. carte géologique). Débris de skarn et de calcite rose au sol. Les environs sont jonchés de feuillets et de paillettes de mica. (Photo 3 nov. 2013.)


Ajout (4 nov. 2013)

Vieille (1914) carte géologique de la mine Blackburn (dite aussi mine Nellis et Vavasour). La compréhension de la géologie ayant évolué, la légende est devenue en partie obsolète. Les contours des formations et la cartographie elle-même restent cependant valables. La carte a aussi un intérêt historique. Comparer avec la carte de Hogarth (1972), plus haut.



Mine Blackburn (ou Vavasour, ou Nellis, comme ici) à Cantley (Stanfield, 1914.) Les «mica-bearing veins» sont des filons de calcite rose contenant, outre le mica (phlogopite), de l'apatite.
Tirée de : J. Stanfield, 1914 — «Excursion A8 : gisements minéraux du district d'Ottawa», in : Excursions aux environs de Montréal et d'Ottawa. Commission géologique, Livret-guide no 3 (excursions A6, A7, A8, A10, A11), Ottawa, Imprimerie du Gouvernement, 1914.

dimanche 17 janvier 2010

Prolongement de l'autoroute 5, Chelsea (Québec) : vallée du ruisseau Meech (3)

9041. – L'Outaouais est piquetée de mines d'apatite et de mica (phlogopite) abandonnées dont les gisements se concentrent dans un type particulier de roches, les roches calco-silicatées* et les filons de calcite dont elles sont les hôtes**. La nouvelle section de l'autoroute 5 à Chelsea (Québec), inaugurée en décembre 2009, offre une coupe à travers ce genre de formations. Manque de bol pour les (anciens) mineurs et les collectionneurs (actuels) de minéraux, cette tranchée de route semble stérile... (Oct. 2008)
Vert (diverses teintes) : roche calco-silicatée ; rose : filons et masses de calcite ; rouge : granite .

(SUITE DE LA «PARTIE 2».)

Voir «ANNEXE : quelques minéraux», à la fin du billet.

QUELQUES DATES**
De 1870 à 1890, l’Outaouais a été le centre minier le plus actif du pays. Le principal minéral exploité était l’apatite (minerai du phosphate) dont les gîtes parsèment le territoire. Les gisements, modestes et dispersés, de teneur erratique, n’ont pu soutenir longtemps la concurrence étrangère ; dès 1890, les mines d’apatite connaissent un déclin avec l’arrivée sur le marché du phosphate des vastes gisements étatsuniens. Le mica prend le rôle dominant laissé par l’apatite (1895-1965), d’autant que ces deux minéraux se rencontrent au sein des mêmes gîtes, les filons de calcite associés aux roches calco-silicatées.
Durant les années 1950, on a prospecté ces formations pour l’uranium sans découvrir, parmi les nombreux gisements relevés, aucun qui soit rentable. Le regain d'intérêt pour ce métal et la reprise de sa prospection, ces dernières années, en inquiète plus d'un. Mais ceci est un autre sujet... Enfin, signalons l'exploitation sporadique de la molybdénite.
Les gisements d'apatite, de mica et de molybdénite n’ont plus de valeur économique, mais pour les collectionneurs de cristaux, ils conservent leurs attraits.

AUTOROUTE 5 – CARTE GÉOLOGIQUE

Selon la carte de Dupuy (1989), déjà affichée dans le premier billet de cette série, la nouvelle section de l'autoroute 5 coupe à travers une colline composée en grande partie d'une variété de roche calco-silicatée (M14c ; diopsidite verte/blanche). Les X blancs indiquent la tranchée de route dont les photos sont mises en ligne dans le présent billet et le précédent. Les différentes roches calco-slicatées (M14 et M15) sont regroupées sous la même teinte de vert. (Voir légende de la carte.)
Note. – Les photos 150-151, 161 et 173 seront l'objet du prochain billet.


LES ROCHES CALCO-SILICATÉES (RCS)
Comme leur nom l'indique*, les RCS ont une composition dominée par les silicates de calcium (et de magnésium), tel le diopside.

La genèse des RCS fait encore l'objet de débats. Les hypothèses à ce sujet ne manquent pas et le cahier de charge proposé aux géologues qui prétendent trancher la question s'avère complexe. Sur le terrain, un indice, au moins, apparaît à l'évidence : l'association étroite des RCS et du marbre. Plusieurs avancent que les RCS sont des calcaires silicieux métamorphisés ; d’autres (ou les mêmes…) invoquent l'influence mutuelle et diffuse (on dit métasomatisme) de marbres dolomitiques (c.-à-d. magnésiens) et de gneiss silicieux durant le métamorphisme.

La circulation de fluides d'origine métamorphique ou magmatique – dans ce cas, provenant de l'intrusion de granite – aurait participé aux processus et les aurait prolongés, lessivant les roches ici pour précipiter le carbonate de calcium, le magnésium, le phosphate et le fluor là. Ainsi, entre autres, se seraient formé sur le tard (relativement) les veines de calcite-apatite-phlogopite qui recoupent les RCS…

Imaginez des influences diffuses entre bancs de roches ; des échanges, pas nécessairement équilibrés, par l'entremise de fluides minéralisés (peut-être du granite, si vous y tenez, pour alimenter et faire circuler des courants hydro-thermaux) ; bref, une chimie complexe à 20 km de profondeur, se déroulant en de multiples étapes, simultanées ou successives, et vous ne serez pas loin de la vérité.

Les RCS et les filons de calcite font partie des roches de la province de Grenville, âgées d'un peu plus d'un milliard d'années.

PHOTOS
Octobre 2008 ; NW à gauche, SE à droite.
Voir carte ci-haut pour localisation.

9034. – Roche calco-silicatée (sur la carte, M14c : diopsidite – d'après le minéral dominant, le diopside) partie vert pâle, partie vert foncé, envahie par de la calcite rose-orangée. Le tout est recoupé par du granite rouge sombre tardif. Des lambeaux vert foncé sont dispersés et plissés dans la partie claire de la RCS (qui comprend, selon mes notes, de la calcite grise, mais il est difficile sur ces photos d'en préciser le contours des concentrations).

9035. – Détail N de la photo 9034. Intrusion de granite rouge sombre tardif dans la RCS déjà recoupée par de la calcite orangée. Lambeaux verts de la RCS dans le granite rouge ; des filons verticaux tardifs de granite un peu plus pâle découpent le granite et les fragments de la RCS.

9035a. – Détail de la photo 9035. Les filons verticaux de granite pâle se distinguent mieux (partie gauche de la photo) ; ils coupent à travers toutes les autres roches, dont le granite rouge sombre et les fragments de la RCS que celui-ci avait précédemment engloutis.

9039. – Calcite orangée dans la RCS. Détail de la photo 9041.

9049. – Phlogopite dans la RCS, entraînée par la calcite. Les cristaux sont minuscules, pas de quoi ameuter les collectionneurs...

9030. – Vue d'ensemble, déjà publiée dans la «Partie 2» de la présente série de billets. On peut reconnaître les sections déjà montrées plus haut ; la photo 9049 a été prise immédiatement au S (à droite) de la partie représentée ici.


RÉFÉRENCES
Dupuy, H., 1989, Géologie de la région de Wakefield-Cascades. Ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, Québec, MB89-18, 1989, 14 pages, avec 1 carte (1/20 000).
Le prolongement de l'autoroute 5 : pour la sécurité! Transport Québec. [Lien mis à jour.]

ANNEXE
Quelques minéraux mentionnés dans ce billet*.
La plus grande partie du contenu de cette section est adaptée du Guide pratique d’identification des minéraux, par Jean Girault et Robert Ledoux, Publications du Québec, 1991, 114 p.

APATITE (n. f.)
Phosphate de calcium comprenant du fluor et du chlore. Les apatites de la région de Gatineau sont des fluor-apatites. Source de phosphate (engrais, industrie chimique).
CALCITE (n. f.)
Carbonate de calcium. Minéral constituant du marbre. Ciment et chaux ; métallurgie ; industrie chimique, (neutralisant) ; industrie des pâtes et papiers ; amendement des sols. Pierre concassée et de construction (marbre).
DIOPSIDE (n. m.) ; HÉDENBERGITE (n. f.) ; AUGITE (n. f.)
Silicates du groupe des pyroxènes, formant une série continue, respectivement de calcium et de magnésium, de calcium et de fer, de calcium, de fer et de magnésium. La couleur varie de blanc à vert selon la teneur en magnésium ou en fer.
DOLOMITE (n.f.)
Carbonate de calcium et de magnésium. Granules blancs, charge minérale, produits broyés pour usages industriels, verre, agriculture, etc.
MOLYBDÉNITE
Sulfure de molybdène ; minerai de cet élément. Aciers réfractaires ; industrie chimique.
PHLOGOPITE (n. f.)
Silicate ; variété de mica magnésien. Isolant thermique et électrique – peintures, panneaux de gypse, ciments, etc.  – lunettes de poêles et fourneaux (autrefois).

NOTES
* Les roches calco-silicatées de la région de Gatineau ont reçu plusieurs noms au cours des décennies : diposidites, clinopyroxénites, métapyroxénites, skarns, etc. Une telle abondance onomastique est mauvais signe et cache mal la perplexité des géologues quant à leur origine...
** Un aperçu raisonnablement complet des ressources minérales de l'Outaouais et de son histoire minière est en préparation... 



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