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vendredi 14 mai 2021

Hors sujet : briques le long du quai de la Gilmour à Hull

La version originale de ce billet a été effacée par le bug qui a affecté Blogger le 14 mai 2021 en soirée. Ceci est une version réécrite le 23 mai 2021.

Brique marquée trouvée sur le bord de l'ancien quai de la Gilmour & Hughson au parc Jacques-Cartier (Hull, Gatineau). La première lettre peut être un C ou un O (voir détail plus bas). 
Dans un cas comme dans l'autre, il ne peut pas s'agir d'une variété de brique écossaise semblable à celles que l'on trouve aux alentours (voir billets des 4 sept. 2016 et du 21 sept. 2020, liens dans le texte). 
Je n'ai en effet relevé aucune « OB Co » ou « CB Co » dans l'index du site de la Scotland's Brick Industry. Photo 15 mai 2021.
(AJOUT 15 juin 2021). - C'est bien une « OB Co », j'ai vu des débris de deux autres briques avec des inscriptions plus claires sur le rivage.)


Mettant à profit l'effacement inhabituel des badauds de l'après-midi, le niveau relativement faible des eaux printanières de l'Outaouais et la discrétion passagère de la végétation renaissante, j'ai pu explorer le bord de l'ancien quai de la Gilmour & Hughson au parc Jacques-Cartier, à Hull. Le quai est au nord du pont Cartier-Macdonald, 200 m au SE de l'emplacement de l'ancien moulin à vapeur de la compagnie, à l'embouchure du ruisseau de la Brasserie dans l'Outaouais.

Billets à consulter sur le même sujet (pour savoir de quoi il est question ici)

À consulter aussi 


Briques « sans nom », rive de l'Outaouais, bord de l'ancien quai de la Gilmour. Photo 14 mai 2021.

Le plat terrain à fleur d'eau sous le plateau du parc est en réalité le vestige d'un quai. Il existait déjà en 1887 comme l'atteste une carte de cette année (billet du 11 sept. 2020b). Chaque printemps, la rivière se déleste d'un chargement de sable sur le plateau herbeux aujourd'hui naturalisé. Le sol, hors cet apport sableux, me semble argileux et semé de blocs. Remplissage ou origine naturelle ? Je penche pour la première hypothèse. Des éléments en bois du quai se devinent le long de la rive, des fragments d'outillages en fer achèvent de rouiller entre les galets et les briques battus par les vagues (billet du 11 sept. 2020a et 2020b). Mon expédition de cet après-midi m'a permis de découvrir des fragments de trois briques réfractaires d'origine écossaise, une CALEDONIA et deux GARTCRAIG, sœurs de celles qui se trouvent sur la rive sous l'ancien moulin à vapeur qui s'élevait autrefois au nord (billets du 4 sept. 2016 et du 21 sept. 2020). 


Frotti mettant en évidence le bourrelet (bulle éclatée à la cuisson ?) qui empêche de décider s'il faut lire la première lettre C ou O. Photo 16 mai 2021.
(AJOUT 15 juin 2021). - Il faut bien lire OB d'après d'autres briques vues sur le rivage.)

Un moment, j'ai cru avoir mis la main sur une nouvelle variété de brique écossaise, une « OB Co  » ou une « OC Co ». Un relief irrégulier sur le côté droit de la première lettre empêche d'être sûr qu'il s'agit d'un C ou d'un O déformé. (Je penche pour la première hypothèse.) Dans un cas comme dans l'autre, ma trouvaille est absente de l'index du site de la Scotland's Brick IndustryCependant, la plupart des nombreuses briques, entières ou réduites en morceaux, éclats ou grains qui s'incorporent au sable, sont des briques rouges « sans nom » - réfractaires ou non, je ne saurais juger de la différence. (Des briques semblables se trouvent aussi sur la rive au nord, sous l'ancien moulin.) (AJOUT 15 juin 2021). - C'est bien une « OB Co », j'ai vu des débris de deux autres briques avec des inscriptions plus claires sur le rivage.)

Échantillon plus lisible. Photo 15 juin 2021. (AJOUT 18 juin 2021.)

Une CALEDONIA. Photo 14 mai 2021.

Mes trouvailles sur le « quai » ne permettent pas de résoudre la question de la provenance des briques écossaises avérées du secteur. Débris du moulin démoli dans les années 1930 (et années 1950 pour la cheminée) ou ingrédients de remplissages subséquents ? 

Je ne peux répondre.

La stratigraphie du quai, si je la connaissais, m'éclairerait sans doute. De bas en haut, on devrait avoir le rivage original, l'ancien quai et, plus ou moins mêlés, des briques et des débris de béton (plusieurs âges, sans doute), le terreau (terre et blocs) et du sable. La végétation renaissante surmonte tout ça. Faudrait creuser une tranchée.

Plus la tour de fer. N'oublions pas cet élément du paysage ! (Voir billet du 11 sept. 2020b.)


Fragment d'une GARTCRAIG. 
Photo 14 mai 2021.
Fragment d'une autre GARTCRAIG. 
Photo 14 mai 2021.



mardi 13 octobre 2020

Brique écossaise du lac Leamy (AJOUT)

Photo Paul Paquette, lac Leamy, Gatineau QC, 2017.
Cette demi-brique a été découverte par M. Paul Paquette au lac Leamy (Gatineau QC), à l'endroit où s'élevait le moulin à vapeur de la scierie d'Andrew Leamy (1854-1874 ; voir billet du 6 août 2020 ; « Le canal oublié du lac Leamy ».)

L
a brique portait une marque de son fabriquant. Seule la fin des trois lignes de l'inscription était lisible :

... ENT
... (W?)N & SON
...LEY


M. Paquette a aussitôt fait le lien avec les briques réfractaires importées d'Écosse trouvées sur le site voisin de l'ancien moulin à vapeur de la Gilmour & Hughson, au parc Jacques-Cartier (1873-1933 ; voir billet du 21 sept. 2020, « Les briques écossaises de la Gilmour ».

L'Écosse a longtemps été une grande productrice de briques réfractaires. Elles étaient recherchées pour leur qualité et les commandes affluaient de partout au monde. Le Château Frontenac par exemple se pare d'un « revêtement mural de brique de Glenboig orangée [1]. » À propos de la briquerie de Glenboig, justement, on dit ceci : « C'était la plus grande manufacture de briques réfractaires au monde à la fin du XIXe s. et les GLENBOIG ont été exportées dans presque tous les pays industrialisés (ma traduction) [2]. »

J'ai consulté le site Internet de Cranston, Scotland's Brick Industry, consacré, comme son nom l'indique, à l'industrie de la brique en Écosse. N'ayant pu trouver parmi sa nomenclature de briques une qui corresponde à celle de M. Paquette, j'ai envoyé un courriel à M. Cranston pour lui demander d'éclaircir la question.

[1]. - « Lieux patrimoniaux du Canada », http://www.historicplaces.ca/fr/rep-reg/place-lieu.aspx?id=1320, consulté le 4 mars 2017.
[2]. - « It was the largest fireclay company in the world at the end of the 19th century and GLENBOIG firebricks were being exported to nearly every industrial country in the world. » http://www.scottishbrickhistory.co.uk/glenboig-3/, consulté le 4 sept. 2016.

Voici la réponse de M. Cranston, venue par courriel, texte et photo :

Photo Mark Cranston.
« Yes indeed your brick is Scottish and would have read "Patent R Brown & Son, Paisley''. 

Robert Brown was a very influential businessman in the Paisley, Glasgow area and he was also the Provost of Paisley for a number of years.

He owned several brickworks in the area, Ferguslie Fireclay Works, Shortroods Brick and Tile Works and the Caledonian Brick and Drain Pipe Works. »

Bref, la brique de M. Paquette est bien d'origine et de fabrication écossaise. Celle de M. Cranston est toutefois plus photogénique que la sienne...

La brique du lac Leamy et de celles de la Gilmour pourraient cependant provenir de remplissages récents (après 1950). Mais comme elles ont été trouvées à l'endroit où se sont élevés autrefois des moulins à vapeur, j'accorde un poids relatif à cette hypothèse. Les briques ont toutes les chances d'être des reliques de ces anciens moulins.

Elles ont traversé l'Atlantique pour servir quelque part à quelque chose avant d'être répandues au sol ! Il serait intéressant de savoir s'il y a eu d'autres moulins à vapeur dans la région. Sujet à explorer...

Notons que si les fondateurs de la Gimour étaient d'origine écossaisse, Andrew Leamy était d'origine irlandaise (voir mes deux billets cités plus haut).

Montage et retouches Henri Lessard © 2018.


Le lac Leamy : position du moulin à vapeur de la scierie d'Andrew Leamy, 1884 vs 2018.

1884 (carte)
A : Old Canal (datant de 1848); 
B : New Canal (datant de 1865); 
C : Leamy’s Old Steam Mill; 
D : décharge du Lac Leamy dans l’Outaouais; 
E : entrée du cours d’eau intermittent qui s’écoulait dans le ruisseau de la Brasserie; 
RG : rivière Gatineau; pointillé dans la Gatineau : estacades.
Modifié du Plan of the government works at the mouth of the Gatineau River. Surveyed by W.J. Macdonald. P.L.S. Ottawa, Dec. 6th 1884. J.H. Roy (détail).
No MIKAN 4133993, 
Bibliothèque et Archives Canada.


2018, photo satellite (© Google)
I : île dans la Gatineau ; 
LC : lac de la Carrière.

AJOUT (14 oct. 2020)

À propos de la possibilité de trouver des briques écossaises ailleurs dans la région, signalons celle trouvée à Rockland (ON) et dont parle le site Scotland's Brick and Tile Manufacturing Industry de Mark Cranston.

Il s'agit d'une Gartcraig Scotland No 6*. Elle a été trouvée par Helen Pace : « The brick we found in our yard in Rockland, Ontario, Canada », selon ses propres mots.

* Le site de la Gilmour a donné une Gartcraig Scotland No 1. (Voir le billet du billet du 21 sept. 2020, « Les briques écossaises de la Gilmour ».)

Gartcraig Scotland No 6.
Photo Helen Pace, Rockland ON, dans : 

Rockland est située à moins de 50 km à l'est de Gatineau, sur la rive droite de l'Outaouais, en Ontario. 

« In 1868, a young entrepreneur, William Cameron Edwards, decided to establish a sawmill at the McCaul point [Rockland]. [...] The woodmill owned by W. C. Edwards closed in 1926, as a result of the economic turmoil following the First World War. » (Wikipédia)

Le moulin à vapeur de Rockland a été la proie des flammes en 1875 pour être ensuite reconstruit*. 

* Hughson, John W. et Courtney C.J. Bond. Hurling Down The Pine. The story of the Wright, Gilmour and Hughson Families, Timber and Lumber Manufacturers in the Hull and Ottawa Region and on the Gatineau River, 1800-1920. Chelsea, Historical Society of the Gatineau, 1987, 3e édition, révisée, (1re éd. 1964), p. 51.

Moulin à scies (à vapeur) Edwards, à Rockland ON, en 1914. Au loin, la rivière des Outaouais et la Bouclier canadien, au Québec, sur la rive nord.

Source : Histoire de Rockalnd. E. Paul, 1914 ; don de John Conningham, Bibliothèque Publique de Clarence-Rockland, Digital Prescott Russell en Numérique.  

Le fait que ces briques réfractaires écossaises n'ont été rencontrées jusqu'ici que sur le site d'anciens moulins à vapeur conforte l'hypothèse qu'elles proviennent bien de ces moulins. Mais pourquoi tant de briques disparates pour trois moulins à vapeur ? La question, déjà posée dans le billet du billet du 21 sept. 2020 (« Les briques écossaises de la Gilmour ») n'a toujours pas trouvé de réponse satisfaisante. Le fait qu'ils aient souvent été incendiés et reconstruits explique peut-être en partie la variété des débris.

Brique après brique, nous arriverons bien à quelque chose...

lundi 21 septembre 2020

Hors sujet : Les briques écossaises de la Gilmour


Il y a une suite à cet article : billet du 13 oct. 2020, « Brique écossaise du lac Leamy » :
https://geo-outaouais.blogspot.com/2020/10/brique-ecossaise-du-lac-leamy.html


Texte adapté de mon article : Henri Lessard, « Les briques écossaises de la compagnie Gilmour », Hier Encore, no 10, 2018 (p. 48-53). Voir le billet du 4 sept. 2016 qui l'a précédé et inspiré : « Hors sujet : briques écossaises à Gatineau ».)

Les photos sont de moi et ont été prises en octobre-novembre 2015 et en août-septembre 2016, sauf indication contraire pour la date.


Photo 1. La Maison du vélo (X sur la Carte 1),
ancien bâtiment administratif de la 
Gilmour & Hughson construit en 1892.


INTRODUCTION

Depuis quelque temps, je mène des recherches pour m’assurer de l’existence d'anciennes digues sur la rive droite du ruisseau de la Brasserie, au nord de l'Île-de-Hull. À défaut de poser le pied sur l’une de ces constructions[1], je suis malgré tout parvenu à mettre la main sur quelque chose de tout à fait palpable et même de carrément pondérable, vous en conviendrez : un surprenant lot de briques d'origine écossaise (Lessard, 2016).

[1]. - La rédaction de ce texte date de 2017. Depuis la parution de cet article en 2018, je suis parvenu à mettre pied sur cette digue ou jetée. Voir le billet du 19 nov. 2015, « Ruisseau de la Brasserie : recyclage d'anciennes structures » et suivre les liens.

L'extrémité NE de l'Île-de-Hull forme un promontoire à la pointe duquel le ruisseau de la Brasserie se jette dans l'Outaouais. Ce plateau régulier est aujourd'hui partie du parc Jacques-Cartier. La Maison du Vélo, petite construction en pierre calcaire locale, constitue le centre du secteur (Photo 1). Elle accueillait à l’origine les bureaux de la Gilmour & Hughson Company[2] qui, de 1873 à 1920, a exploité une scierie sur le terrain (carte 1).

[2]. - « Le bâtiment a été construit [en 1892] par Richard Lester, un maçon d’Ottawa, pour loger le siège social de l’entreprise forestière de la Gilmour Hughson Lumber Co. » « Lieux patrimoniaux du Canada », http://www.historicplaces.ca/fr/rep-reg/place-lieu.aspx?id=10859, consulté le 4 mars 2017.

CALEDONIA


La rive du ruisseau sous le promontoire est jonchée de débris de toutes sortes, ancres de béton, pièces de fer rouillé, briques sans nombre, intactes, brisées ou réduites à des éclats, pierres taillées en calcaire. On y trouve aussi les ruines d’un convoyeur (conveyor, ou jackladder) qui acheminait les billes de bois à la scierie, sur le plateau, des empilements de lattes laissées à pourrir sur place depuis presque 100 ans et servant de terreau à un boisé (cf. « Laths Piled 10’ High » sur la Carte 1 ; voir Lessard, 2015a).

Le promeneur curieux remarque que les briques, éparses ou en tas, portent en creux des inscriptions en lettres capitales : CALEDONIA, GLENG..., etc. (Encadré no 2).

J'ai d'abord cru qu'il s'agissait de noms de villes et de cantons de l'est de l'Ontario (cf. Caledonia, Glengarry, etc.). Quelques efforts de déchiffrement plus tard et, avec l'aide de Google, la vérité m'est apparue : il s'agissait plutôt de marques de briques... écossaises !


HURLL NWR : fabriquée en Écosse pour
la North Western Railway des... Indes !


ENCADRÉ 1. – LE SITE DE LA GILMOUR & HUGHSON DANS L’ÎLE-DE-HULL

Note. - Données à considérer avec prudence. Les sources ne donnent pas toujours les mêmes dates et il est parfois difficile de concilier entre-elles les différentes relations des faits. Les données suivies d'un [HB] proviennent de Hughson et Bond (1987) ; d'un [Dm], de Louise Dumoulin (2016) et d'un [Dv], de Davidson (1998).
J'ai aussi examiné des photos de la Photothèque nationale de l'air (PNA). J'ai uniformisé les noms des compagnies et des entreprises d'après la forme anglaise d'origine pour palier aux appellations disparates utilisées par les sources.


  • 1841. - Constitution de la Gilmour & Company [HB] par Allan et James Gilmour, nés en Écosse [Dm] ;
  • 1873. - Installation de la Gilmour & Company à la confluence du ruisseau de la Brasserie et de la rivière des Outaouais ; construction de la première scierie à vapeur [HB] ;
  • 1875. - Incendie de la première scierie à vapeur qui est reconstruite [HB] ;
  • 1884*. - La seconde scierie à vapeur est détruite par un incendie et n'est pas reconstruite [HB) ;
  • 1891. - Constitution de la Gilmour & Hughson [HB] ;
  • 1892. - Construction du bureau administratif (Maison du Vélo actuelle) et décision de rebâtir la scierie à vapeur qui est opérationnelle en 1894 [HB] ;
  • 1896. - Constitution de la Gilmour & Hughson Ltd. [HB] ;
  • 1900. – Le Grand Feu de Hull : la cour à bois de la Gilmour est réduite en cendres [Dm] ;
  • 1920. - La Gilmour and Hughson Ltd. passe aux mains de la Riordon & Co. de Montréal ; banqueroute de la Riordon [HB] ;
  • 1921. - La Gilmour and Hughson Ltd. passe à la Gatineau Co. Ltd., filiale de la Canadian International Paper Co. (CIP) [HB] ;
  • 1925. - Cessation des activités [Dm) ;
  • 1930. – Proposition de l’érection sur le terrain d'un monument en l’honneur des citoyens de Hull morts à la Grande Guerre [HB] ;
  • 1933. - La Commission du district fédéral achète le terrain ; démolition de la scierie. Le bureau administratif demeure de même que la cheminée de la scierie [Dv].
  • 1938. – La Commission du district fédéral accepte le projet de monument ; la Seconde Guerre mondiale ajourne sa réalisation. Le projet renaît en 1950, sans suite [HB] ;
  • 1951-1954. - Destruction de la cheminée. Une photo de la PNA d'avril 1951 atteste que la cheminée était encore debout ; une autre qu’elle n’existait plus en mai 1954 ;
  • Vers 1954. – L’édifice des bureaux accueille la bibliothèque municipale. Le bâtiment est ensuite occupé par un théâtre de poche, le Grenier, où se produit le Théâtre du Pont-Neuf ;
  • 1959. – La Commission du district fédéral devient la Commission de la capitale nationale ;
  • 1992. – L’édifice des bureaux est classé édifice fédéral du patrimoine reconnu (consulter note [2]) ;
  • 1995-aujourd’hui. – Maison du Vélo dans l’édifice des bureaux.
* Le texte indique 1874, ce qui est sans doute une erreur [HB, p. 47].



Restes d'un mur de pierre taillée au pied du talus
du ruisseau de la Brasserie ; des pierres taillées
éparses gisent au sol à côté. Une poutrelle de fer
non visible est demeurée prise dans l'assemblage. 
Photo 14 sept. 2020.


VENUES DE LOIN

L'Écosse a longtemps été une grande productrice de briques réfractaires. Elles étaient recherchées pour leur qualité et les commandes affluaient de partout au monde. À propos de la briquerie de Glenboig, par exemple, on dit ceci : « C'était la plus grande manufacture de briques réfractaires au monde à la fin du XIXe s. et les GLENBOIG ont été exportées dans presque tous les pays industrialisés (ma traduction)[3]. »

[3]. - « It was the largest fireclay company in the world at the end of the 19th century and GLENBOIG firebricks were being exported to nearly every industrial country in the world. » http://www.scottishbrickhistory.co.uk/glenboig-3/, consulté le 4 sept. 2016.

Le Château Frontenac par exemple se pare d'un « revêtement mural de brique de Glenboig orangée »[4].

[4]. - « Lieux patrimoniaux du Canada », http://www.historicplaces.ca/fr/rep-reg/place-lieu.aspx?id=1320, consulté le 4 mars 2017.


Photo 2. - Élément de l'arche (ma photo,
 interprétée en suivant Davidson, 1998).


J'ai consulté par courriel Mark Cranston qui tient le site Scotland's Brick Industry, consacré, comme son nom l'indique, à l'industrie de la brique en Écosse (Mark Cranston, voir Références).

La présence d'une si grande variété de marques de briques à un seul endroit lui est apparue très surprenante.


ENCADRÉ 2. – MARQUES DE BRIQUES IDENTIFIÉES SUR LE TERRAIN DE LA GIMOUR

Selon Mark Cranston, comm. personnelles, sept. 2016, et son site Internet, Scotland's Brick Industry (voir Références).

ASB... (ASBESTOS)
CALEDONIA
CUMBERNAULD
GARTCRAIG
GARTCRAIG SCOTLAND NO 1
GLENBOIG
HURLL GLASGOW
HURLL NWR
...GHEAD (BOGHEAD)
OB... (OBSIDIAN)
...STER (FOSTER ? (brique anglaise))
.../77CAR : ?
Brique avec un cartouche sans nom.


Selon Mark Cranston, les briques marquées HURLL NWR (photo no 2) auraient été fabriquées en Écosse pour la North Western Railway des... Indes[5] ! Que sont-elles venues faire à Hull, P.Q. ? Je doute qu'en partance de l’Écosse, elles aient transité par les Indes avant d'aboutir sur la propriété de la Gilmour, deux km en aval du Parlement d’Ottawa !

[5]. - Scotland's Brick Industry, http://www.scottishbrickhistory.co.uk/hurll-nwr/, consulté le 5 sept. 2016 ; suivre les liens dans la page.


HURLL GLASGOW


Au cours de nos échanges, nous nous sommes demandés, M. Cranston et moi, si la Gilmour ne se serait pas fournie en briques parmi des surplus de stocks. Ça expliquerait l'étonnante variété de marques concentrées en un seul endroit.

Davidson (1998) signale bien la présence de fire bricks le long du rivage, mais sans s’attarder à les décrire. Il ne touche mot, par exemple, des marques imprimées qu’elles portent. Selon lui, les pierres taillées en calcaire tout comme les briques proviennent de la scierie de la Gimour et de sa cheminée. Il mentionne aussi de larges fragments d’une arche de brique et de pierre. J’ai repéré l’un de ces fragments, entièrement fait de briques « normales » m’a-t-il semblé – c.-à-d. non marquées. La liste des objets retrouvés dans l’eau ou sur le rivage est évocatrice : câbles de fer, maillons de chaînes, bandes de fer rouillées, « blacksmith spikes » (crampons ?), clous et fragments de la scie d’une scierie.


GARTCRAIG


HYPOTHÈSES

L'étonnant, redisons-le, n'est pas la présence de briques réfractaires écossaises en Outaouais : l'Écosse en a exporté à travers le monde entier, on l’a vu. C'est plutôt la grande variété des marques qui surprend.

Les suppositions raisonnables ne sont pas légion :

• Hypothèse no 1. – Les briques proviendraient de la dernière scierie à vapeur construite par la Gilmour, construite en 1893 et démolie en 1933 (Encadré no 1). Quoi de plus approprié pour une machine à vapeur fixe que des briques réfractaires ? (Ce qui amène d’inévitables questions supplémentaires : que sont devenus les débris des deux premières scieries incendiées ? Et comment faire la distinction entre les briques des trois scieries, en supposant qu’il n’y a pas eu de réemploi ?) Mais j'imagine mal des entrepreneurs édifier leurs installations industrielles à partir de surplus de stocks de briques dépareillées. Autre fait dissonant, les briques semblent n'avoir jamais servi (nulle trace de mortier ou ciment, sauf sur les restes de l'arche. Cependant, Davidson (1998) présente cette idée non pas comme une hypothèse, mais comme un fait évident en lui-même. De plus, Mark Cranston (comm. pers., 5 sept. 2016) ne voit pas d’inconvénient à supposer un approvisionnement à partir de surplus de stocks. Ajoutons que les débris éparpillés sur la rive sont ceux qu’on s’attendrait à trouver dans les environs d’une scierie démolie.


CUMBERNAULD


• Hypothèse no 2. – Les briques ont pu entrer dans la composition de chargements de remplissage. Hypothèse recevable puisque les rives du ruisseau de la Brasserie ont effectivement été « remplies » à plusieurs endroits, notamment par du matériel provenant des plaines Le Breton, à Ottawa (Samson, 2012, p. 25). Selon Raymond Ouimet (comm. pers., 11 févr. 2017), on a même trouvé des... pierres tombales près du convoyeur ! Ça ne règle pas la question de l’aspect de bric et de broc qui se dégage de cette accumulation de briques disparates. Quelle compagnie les aurait conservées rien que pour les jeter ensuite ? Cette hypothèse, qui a eu ma faveur un moment, ne fait que pelleter le problème (expression appropriée !) plus loin.

Pour compliquer les choses, l'escarpement, tout près de la rive, est difficilement lisible. À l’origine, je le croyais taillé par l’érosion dans l’argile marine, mais la terre est semée de débris rocheux qui laissent soupçonner du remplissage ou des déversements. La végétation, très dense, empêche de discerner une quelconque séquence dans les déversements et autres interventions humaines. Je doute qu’il subsiste un seul mètre cube du plateau et des rives qui soit demeuré dans son état naturel tant on y a creusé, déboisé, reboisé, bâti et démoli pour enfin y éparpiller des débris de toutes provenances.


Briques en tas, surtout des CALEDONIA.


CONCLUSION
À la fin, je serais plutôt enclin à me ranger du côté de Cranston et de Davidson. Les briques proviendraient bien de la scierie à vapeur de la Gilmour. Notons en plus que les fondateurs de la Gilmour étaient nés en Écosse (Encadré no 1).

Ceci n’empêche pas de chercher au pied du promontoire des matériaux de remplissage provenant de sources diverses. Je pense aux pierres tombales, par exemple.

Cette dernière remarque est d’autant plus sensée que plusieurs années ont séparé la démolition de la scierie de celle de la cheminée (Encadré no 1). On peut supposer qu’aux moins deux vagues de débris se sont succédé sous le promontoire, sans compter la possibilité que les restes d’autres industries voisines aient été « dumpés » à cet endroit (la Woods Manufacturing, par exemple, industrie textile expropriée en 1960 par la CCN dont la manufacture était située au sud de la Gilmour (Dumoulin, s.d.).



Briques en vrac...


Cuites en Écosse, enterrées ou noyées en Outaouais, ces briques ont connu un drôle de destin. On ne finit jamais de (re)découvrir le passé. La région conserve dans ses archives informelles (c’est ainsi que je qualifie les remplissages) des éléments du passé industriel de l’Écosse et de l’Outaouais. Le local rejoint l’universel...


Il serait amusant de retourner certaines de ces briques en Écosse, pour meubler les archives de M. Cranston. Expédier des briques par la poste est prohibitif. Si un mécène veut financer leur voyage de retour… Il en coûterait environ 140 $ pour poster quatre briques par surface, en Écosse ; veuillez allouer 4 à 12 semaines pour la livraison.


Photo 3. - Vestige d'un certain
décorum : pierre calcaire taillée.


Après examen de photos de la Photothèque nationale de l'air (PNA) de Ressources naturelles Canada (RNCan), à Ottawa, l'histoire du site m'est apparue beaucoup plus riche et complexe que je l'imaginais. Plusieurs jours seraient nécessaires pour dépouiller et interpréter toutes les photos et dresser un portrait raisonnablement complet de l’évolution de cette partie du parc Jacques-Cartier. Par exemple, ce qui semble être quatre gros réservoirs, chacun pouvant contenir une maison, apparaissent sur des photos aériennes de 1933 et 1938. Une piste de course oblongue occupe le côté est du plateau en 1938. Dix ans plus tard, les réservoirs n'y sont plus, mais un matériel clair est déposé ou excavé dans leurs fondations tandis que le fantôme de la piste de course transparaît dans la pelouse. Des installations sont toujours présentes du côté ouest du plateau au moins jusqu’en 1956 et... On n’en finirait pas et c’est un autre sujet ! (Voir billet du 23 août 2017, « Les quatre réservoirs oubliés de l'ex-Gilmour à Hull », et suivre les liens.)

Merci à Louise Dumoulin qui a lu l’ébauche de ce texte et qui m’a communiqué de pertinentes remarques. (Les erreurs résiduelles sont de mon fait !)



.

CARTE 1. ─ Terrain de la Gilmour & Hughson Company (acheté dans les années 1920 par la Canadian International Paper Co.) en 1928. Au nord : ruisseau de la Brasserie (embouchure) ou Brewery Creek ; à l'est : l'Outaouais, ou Ottawa River ; le bâtiment carré marqué par un X est l’ancien bureau administratif, maintenant la Maison du Vélo (voir photo 1). Le Saw Mill (moulin à scie) est à l’extrémité NE du terrain. Remarquez les « Laths Piled 10' High » sur la rive du ruisseau : à ce propos, voir Géo-Outaouais (2015a).
Modifié de : Insurance plan of Hull, Quebec, 1928, Toronto ; Montreal : Underwriters' Survey Bureau Limited, 1 carte en 33 coupures : coul. ; 63 x 54 cm chac., échelle : 1:600, feuillet no 25 (3851615_025), Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), Centre d'archives de Québec de BAnQ, P600,S4,SS1,D3, Numéro catalogue Iris : 0003851615.
Lien : http://services.banq.qc.ca/sdx/cep/document.xsp?id=0003851615


RÉFÉRENCES




dimanche 4 septembre 2016

Hors sujet : briques écossaises à Gatineau (ajouts)


Ajout (4 sept. 2016)

Il existe maintenant un prolongement écossais à ce billet (une sorte de retour aux sources !) : http://www.scottishbrickhistory.co.uk/scottish-bricks-found-on-the-banks-of-the-ottawa-river-gatineau-quebec-canada/



1. Bel assortiment de briques écossaises sur les rives de l'Outaouais, à Gatineau. Photo nov. 2105. 

AJOUT (4 sept. 2016) - Mark Cranston (Scotland's Brick Industry) a distingué parmi les briques illustrées dans ce billet des Caledonia, Gartcraig, Glenboig, Hurll NWR, Gartcraig Scotland no 1 et des  Hurll Glasgow.
AJOUT (5 sept. 2016). - Nouvelles marques (photos à la fin du billet) : ASB... (Asbestos ?), CUMBERNAULD, HURLL GLASGOW, OB... (Obsidian ?), ...CHEAD (LOCHHEAD ??) et une brique avec un cartouche sans nom.

Résumé

Briques portant des marques de briqueries écossaises, rive de l'Outaouais, dans les débris de la Gilmour and Hughson Company (moulin à bois), à Gatineau, QC.
31G/05  45.441473, -75.704388

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Références extérieures



J'ai découvert l'automne dernier des briques «marquées» parmi les vestiges de la Gilmour and Hughson Company, sur la rive de l'Outaouais, au nord du parc Jacques-Cartier, à Gatineau. 

Ces briques, tout à fait banales, portent en creux des inscriptions en lettres capitales. CALEDONIA, GLENBOIG, GARTCRAIG, etc. J'ai d'abord cru qu'il s'agissait de noms de villes et de cantons de l'est de l'Ontario (cf. Caledonia, Glengarry). Quelques efforts de déchiffrement plus tard et, avec l'aide de Google, la vérité m'est apparue : il s'agissait plutôt de marques de briques... écossaises !

L'écosse a été une grande productrice/exportatrice de briques. À propos de la briquerie de Glenboig, par exemple, on dit ceci : « It was the largest fireclay company in the world at the end of the 19th century and GLENBOIG firebricks [briques réfractaires] were being exported to nearly every industrial country in the world. » Source : Scotland's Brick Industry (excellent site, très complet) : http://www.scottishbrickhistory.co.uk/glenboig-3/

CALEDONIA, GLENBOIG et GARTCRAIG signalent donc des briques en provenance d'Écosse. Je n'ai pas déchiffré toutes les inscriptions, certaines sont incomplètes ou à la limite de la lisibilité.

De 1873 à 1930, la Gilmour and Hughson Company a exploité un moulin à bois à l'angle NE de l'Île-de-Hull (parc Jacques-Cartier et rive droite de l'embouchure du ruisseau de la Brasserie). Un texte de Michael Davidson datant de 1998 décrit les installations - et ce qui en reste (référence au début du billet). Le site Internet de la Scotland's Brick Industry contient de nombreuses références à la présence de briques écossaises au Canada et plus particulièrement dans notre région (Rockland, ON, par exemple). Même le Château Frontenac se pare d'un « revêtement mural de brique de Glenboig orangée » (source).

Les photos ont été prises en novembre 2015 et en août 2016.

AJOUT (27 févr. 2017)

On peut supposer que les briques ont servi aux trois scieries à vapeur de la Gilmour successivement érigées de 1874 à 1893 et dont les deux premières furent incendiées (Dumoulin, 2016, lien au début du billet ; voir aussi ce billet, fig. 1 : plan du site). À l'encontre de cette hypothèse raisonnable - quel usage plus approprié pour des briques réfractaires ? -, on pourrait faire remarquer que les briques semblent n'avoir jamais servies (nulle trace de mortier ou ciment, sauf sur les restes de l'arche, voir photos 9 et 18). Serait-ce des ingrédients d'un remplissage ? Hypothèse recevable puisque les rives du ruisseau ont effectivement été «remplies» à plusieurs endroits, notamment par de la terre provenant des plaines Lebreton, à Ottawa. Ça n'expliquerait toutefois pas la présence d'un lot si important de briques écossaises si variées dans le matériel de remplissage. Pour compliquer les choses, l'escarpement, tout près de la rive, taillé dans l'argile marine, est difficilement lisible. La végétation, l'accumulation de débris de toutes sortes rendent difficile son examen et empêche de faire la part entre l’œuvre de la nature et les effets de l'intervention humaine.




2. GLEN(BOIG)



3. CALEDONIA (celle-là était facile).



4. GARTCRAIG



5. Je n'ai pas retrouvé de référence pour toutes ces inscriptions, les choses étant plus compliquées quand je n'ai que les dernières lettres (...STER). Certaines inscriptions ne se laissent pas lire. Sur la brique en bas de la photo, on peut distinguer .../77CAR (?).



6. Pas très clair... (AJOUT 4 sept. 2016) : CARTCRAIG Scotland no 1 ?



7. H?RLL / NWR. (AJOUT 4 sept. 2016) Selon Mark Cranston, il s'agit de HURLL NWR : les briques portant cette inscription ont été fabriquées pour la North Western Railway, aux... Indes ! (Lien.) Je n'ai pas trouvé trace de NWR au Canada.


8. Vestige d'un certain décorum.



9. Reste de la cheminée de la Gilmour ? (Correction 5 sept.) Reste de l'arche dont parle Michael Davidson (1998), texte cité en référence au début du billet. Voir photo 18.


AJOUT (photos 5 sept. 2016) : New Bricks in the Blog !


10. Tas de briques, surtout des Caledonia.


11. ASBE (Asbestos ?)


12. CUMBERNAULD


13. HURLL GLASGOW


14. HURLL GLASGOW


15. OB... (Obsidian ?)


16. ...CHEAD (Lochhead ??) Correction : Boghead. http://www.scottishbrickhistory.co.uk/tag/boghead/


17. Sans nom.

18. L'arche, bien reconnaissable. Voir photo 9.

AJOUT (22 sept. 2020). - Restes qui m'avaient échappé d'un mur de pierre taillée dans le talus, sur le bord du ruisseau de la Brasserie ; des pierres taillées gisent dans le bois à côté. Une poutrelle de fer non visible est demeurée prise dans l'assemblage. Photo 14 sept. 2020.