© Andrew King, Ottawa Rewind |
La géologie de la région nous réserve encore des surprises. Témoin cette caverne Pooley en plein centre-ville d'Ottawa. Qui en a entendu parler ? Partant de la cathédrale Christ Church sur le plateau de l'escarpement de la rue Commissionner, elle se jette - ou se jetait - dans un chenal de la rivière des Outaouais sous le pont Pooley, près de la station de pompage de la rue Fleet (au sud du musée de la Guerre). J'ai appris son existence par le site Ottawa Rewind d'Andrew King. Un extrait de son billet, The Legend of Pooley’s Cave (c'est moi qui souligne) :
The “Park of The Provinces” [Jardin des Provinces et des Territoires, rue Wellignton] was built over what was once Brading’s Brewery. And just around the corner from that was a remarkable natural feature of a cavern that stretched east under Sparks Street for apparently more than 200 feet [60 m] all the way to Christ Church Cathedral. This legend originated from the 1800’s and described a “natural wonder” and a room of stalagmites and stalactites that were “beautiful beyond description”. But not a single mention or trace exists today of this incredible underground feature in the heart of the Nation’s Capital. [...] Upon entering the cave, a natural tunnel headed in an easterly direction towards Christ Church Cathedral. Traveling 75 feet [23 m] in a stooped position through the tunnel, it was then said that one had to go on hands and knees for another 40 feet [12 m]. Here, the tunnel widened into a room about 40 feet by 60 feet [18 m x 12 m] where stalagmites and stalactites appeared. Other descriptions mention a running waterfall inside the cave. So, this all sounds pretty cool but where would this be now and would it still possibly be there?
Photo 1. - © Henri Lessard, avril 2014 |
Toujours selon M. King, les restes de l'intrigante tour érigée sur le trajet présumé de la caverne, au pied de l'escarpement de la rue Commissioner, derrière le parc des Provinces et des Territoires (photo 1), laissent sourdre un bruit d'eau courante (rushing water). L'ouverture de la tour, au sommet, a été bétonnée.
Elle pourrait faire partie des aménagements qui de puiser l'eau de la caverne. (J'ai pris la photo en avril 2014 sans me douter le moins du monde de la signification possible de cet ouvrage qui m'intriguait.)
Mais une station de pompage des eaux usées voisine la tour (édifice cubique sur la photo 2) et des installations d'accès aux égouts se trouve à ses pieds. L'affichette « Sanitary Sewer /Égoût sanitaire » (en vert sur la photo 1) et les relents qui flottent dans l'air chassent les derniers doutes sur la nature du glouglou. Ce n'était pas le chant cristallin d'une eau de source qui s'entendait, mais l'écoulement des eaux usées dans des canalisations... Est-ce que l'on aurait utilisé le boyau que fournissait la caverne et les aménagements de la Brasserie ou de la Pure Spring pour installer les canalisations du quartier ? (Hypothèse personnelle.)
D'autres cavernes
Dans son état original, la caverne Pooley aurait pu faire concurrence à la caverne Laflèche de Wakefield (voir ce billet dans mon blogue) avec sa grande salle de 18 m x 12 m, ses stalagmites et ses stalactites. La caverne Laflèche traverse un marbre précambrien vieux de plus d'un milliard d'années. La caverne Pooley s'est attaqué à un calcaire ordovicien, à moitié plus jeune (444-485 millions d'années). Marbre ou calcaire, c'est le même matériau, le même minéral : la calcite, érodable et soluble.
Le calcaire ordovicien de la région s'avère décidément parcouru de crevasses et semés de vides. En vrac, on peut mentionner la caverne Cardinal dans l'est d'Ottawa, le réseau de couloirs creusés sous le lit de l'Outaouais à Pembrooke (ce billet), le « vide » dans le roc sous l'île Lemieux (ce billet), celui près du barrage des Chaudières (ce billet), sans oublier la caverne de Rockland (ce billet). Je me suis d'ailleurs laissé dire que les travaux de construction du quartier Zibi aux chutes des Chaudières avaient été compliqué par des effondrements causés par des vides insoupçonnés dans le socle rocheux. Et je ne parle pas du légendaire Trou du Diable, toujours aux Chaudières (ce billet).
Il y a quelques années, j'ai été prendre des photos dans le secteur de l'escarpement de la rue Commissioner, sans soupçonner l'existence d'une caverne. Comme elle semble avoir été oblitérée du paysage, j'ai des excuses de ne rien avoir deviné. La caverne Pooley s'ouvrait sur le plateau, près de la cathédrale Christ Church (altitude 72 m), passait apparemment sous l'escarpement et se jetait dans un chenal de l'Outaouais en aval du pont Poorley (44 m), soit une dénivellation de 28 m pour une longueur d'environ 350 255 m.
Murée, effacée, oubliée. Triste sort que celui de de la caverne Pooley... La grande salle et une partie du couloir existent peut-être encore sous terre ? Quand on pense aux dégâts que les générations de curieux ont infligés à la caverne Laflèche, je crois que la Pooley, ou ce qu'il en reste, est peut-être mieux préservée ainsi.
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