lundi 1 février 2010

Ottawa, ville sensible

Version préliminaire de la carte discutée dans cet article.
© Ressources naturelles Canada (a).
Version finale : voir détail, plus bas, et «Références», à la fin du texte.

Annoncée depuis un certain temps (Ressources naturelles Canada (a)), attendue par quelques-uns, finalement publiée, la carte de la sensibilité sismique des sols de la ville d'Ottawa, résultat de la collaboration de la Commission géologique du Canada et de l'Université Carleton (Hunter et al., 2009), a été accueillie sans grand tremblement de la part du public. On y apprend pourtant des choses, ma foi, plutôt intéressantes (Duffy, 2009a).

Les auteurs de la carte ont réparti les sols (et le sous-sol) du territoire de la ville d'Ottawa en cinq classes, depuis le socle rocheux sain ou peu altéré (classes A, B – vert, bleu) jusqu'au till glaciaire compact, aux sables fluvioglaciaires et, enfin, aux argiles glaciomarines non consolidées (classes C, D, E – jaune, orangé, rouge).

Le comportement de ces classes de sols en cas de séisme est d'autant plus problématique qu'on s'éloigne du A vert et que l'on se rapproche du E rouge. (On croirait lire du Rimbaud.)

«Durant un séisme, affirment les scientifiques, les secousses ne seraient pas ressenties uniformément à travers la ville, mais différemment de secteur en secteur, selon la nature de la roche en place et la structure du sol. Les zones comblées par d'épaisses couches d'argile à Leda*, comme certains quartiers de Carp et d'Orléans**, seraient susceptibles de connaître de plus fortes secousses et, donc, de subir de plus amples dommages en cas de séisme majeur.» (Duffy, 2009a ; ma traduction.)

Kanata**, où affleure des roches cristallines précambriennes (paragneiss, marbre, etc.), ressentirait moins les effets d'un éventuel séisme. En revanche, Orléans s'est développé en partie au dessus d'une ancienne vallée comblée par de l'argile marine ; l'épaisseur de ce «remplissage», au point de plus grande profondeur, atteint 96 m. La forme de la vallée favoriserait l'amplification des ondes de surfaces, qui sont, parmi les ondes sismiques, celles qui provoquent le plus de destruction.

Le tremblement de terre de Mexico – ville érigée dans un ancien bassin lacustre rempli de sédiments non consolidés –, a fait prendre conscience, en 1985, des dangers liés à ce genre de configuration.

*Argile à Leda. – Argile glaciomarine déposée au fond de la mer de Champlain (entre 12 000 et 10 000 ans avant aujourd'hui). Nommée ainsi à cause d’une moule fossile qu’on y trouve.
** Note pour les «non-locaux» : Carp, Kanata et Orléans sont des quartiers de la ville d'Ottawa.

Détail de la carte de Hunter et al. (2009), version finale. Le centre-ville d'Ottawa se trouve à gauche ; Orléans est à droite, vers l'Est. Au Nord, en blanc, de l'autre côté de la rivière des Outaouais, la ville de Gatineau (Québec). Largeur de la zone représentée : env. 25 km.

ZONE ACTIVE
Il n'existe pas de carte semblable, à ce que je sache, pour la ville de Gatineau. Lacune regrettable ; rappelons, pour ceux qui l’auraient oublié, que Gatineau et Ottawa arrivent en troisième place, après Vancouver et Montréal, dans la liste des agglomérations à risque sismique au pays. Gatineau, comme sa voisine ontarienne, est située dans une zone sismique active, la zone sismique de l'Ouest du Québec :

Zone sismique de l'Ouest du Québec : carte des épicentres. © Ressources naturelles Canada (b).
Note. – Hull, au Nord d'Ottawa, fait maintenant partie de la ville de Gatineau.

«La zone sismique de l'Ouest du Québec constitue un vaste territoire comprenant la vallée de l'Outaouais depuis Montréal jusqu'au Témiscamingue, ainsi que les régions des Laurentides et de l'Est de l'Ontario. Les régions urbaines de Montréal, d'Ottawa-[Gatineau] et de Cornwall sont donc localisées dans cette zone. [...] Grosso modo, les séismes se concentrent en deux sous-zones : une le long de la rivière des Outaouais et une plus active, le long d'un axe Montréal-Maniwaki. [...] La Zone de l'Ouest du Québec a connu au moins trois séismes importants dans le passé.

En 1732, un séisme estimé à 5,8 sur l'échelle de Richter a secoué Montréal, causant des dommages importants.
En 1935, la région du Témiscamingue a été secouée par un séisme de magnitude 6,2.
En 1944, un séisme de magnitude 5,6 localisé entre Cornwall (Ontario) et Massena, N.Y., causa des dommages évalués à deux millions de dollars de l'époque.» (Ressources naturelles Canada (b))
«Les géologues nous préviennent que, d'ici 50 ans, il y a 10 % de probabilités que survienne un séisme assez puissant pour causer des dommages aux buildings de la ville d'Ottawa.» (Duffy, 2009b ; ma traduction.)

RÉFÉRENCES
Duffy, Andrew (2009a), «Exclusive: Scientists map Ottawa quake risk», The Ottawa Citizen, 24 avril 2009.

Duffy, Andrew (2009b), «Engineers to test city structures for earthquake vulnerabiliy», The Ottawa Citizen, 30 avril 2009.

Hunter, J A; Crow, H; Brooks, G R; Pyne, M; Lamontagne, M; Pugin, A; Pullan, S E; Cartwright, T; Douma, M; Burns, R A; Good, R L; Motazedian, D; Kaheshi-Banab, K; Caron, R; Kolaj, M; Muir, D; Jones, A; Dixon, L; Plastow, G; Dion, K; Duxbury, A; Landriault, A; Ter-Emmanuil, V; Folahan, I (éd.), City of Ottawa seismic site classification map from combined geological/geophysical data, Commission géologique du Canada (CGC), dossier public 6191, 2009; 1 feuille.
Disponible gratuitement au site GEOSCAN de la CGC, (pdf de 22 Mb).

Ressources naturelles Canada (a) : «Ottawa Urban Earthquake Hazard Mapping».

Ressources naturelles Canada (b) : «La zone séismique de l'Ouest du Québec»

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