samedi 29 juin 2013

Calcaires hullois : suite


NOTE. – J'ai retiré la carte préliminaire des carrières de calcaires de la ville de Hull (Gatineau) maintenant que la carte finale est parue (second billet du 6 juillet 2013). Je laisse ici celle de Wilson (1938), qui n'apparaît nulle part ailleurs.


Carte de Wilson (1938) : détail annoté. 
On remarque les excavations (lignes avec «piquets») des carrières que j'ai numérotées de W1 à W5. (Les codes de la carte originale (7a, 7c, etc.) de même que la couleur ocre pâle ou foncé (sans affleurement, roche affleurant) indiquent les subdivisions de la formation d'Ottawa, qui comprend le Trenton.)


Il y a déjà quelques temps, j'avais annoncé que je préparais une carte répertoriant les anciennes carrières de pierre de la ville de Hull (maintenant partie de Gatineau). Voilà qui est maintenant chose faite, dans la mesure toutefois où ce billet ne présente qu'une carte préliminaire, sans élaborer davantage. Façon d'annoncer une suite. Comme le blogue n'est pas consacré à l'histoire politique ou économique de la région, je m'en tiendrai autant que possible à des considérations d'ordre géologiques et géographiques.

La pierre exploitée est le calcaire de Trenton (Ordovicien, voir ce billet), à grain variable, de couleur grise.

«Ce sont [...] des pierres semi-cristallines, grisâtres, dans lesquelles la principale variation consiste dans le développement plus ou moins grand de plans de division minces, foncés et argilacés. La présence de ces plans détermine, dans une grande mesure, la valeur de la pierre pour les constructions importantes, de même qu'elle constitue une mesure de leur durabilité sous l'action des agents atmosphériques.» (Parks, 1916, p. 29)

Ajoutons que les joints, omniprésents, peuvent diminuer la possibilité d'extraire des blocs d'un seul tenant de dimensions suffisantes.


Sources

J’ai travaillé d’après des cartes et textes publiés entre 1916 et 1974. Le degré de précision variable des premières (toutes ± à 1/63 630, ou un mille au pouce) et un certain vague dans les descriptions des seconds m’ont empêché de situer toutes les carrières avec autant d’exactitude que je l’aurais voulue. Le danger était, en partant de deux documents, d'amalgamer deux carrières en une seule ou d'en créer deux là où il n'en existait qu'une.

Bref, je donne ma carte pour ce qu'elle vaut : une première esquisse où ne figurent que les carrières «sûres». Le plus simple et le plus prudent serait de se contenter de dire que les deux rives du ruisseau de la Brasserie au nord de la rue Montcalm, entre les rues Lois et le boulevard Saint-Rédempteur, ont déjà été percées de plusieurs carrières. La carte la plus précise de celles consultées, la carte de Wilson (1938), affichée plus bas, ne montre que 5 carrières certaines, ce qui relativise l’importance des autres*.

* Une carte datée de 1942 qui répertorie 40 établissements industriels à Hull ne montre que deux carrières : la Canada Cement Co. Ltd (produit : ciment, of course), qui correspond à W4 sur la carte de Wilson (1938), et la Laurentian Stone Co. Ltd (carrière et four à chaux), au sud de la W1. (Ajout, 1er juillet 2013.)

La seule carrière qu'il est impossible de localiser, même approximativement, est la P7, que Parks (1916) situe sur le bord de l'Outaouais, dans la baie de Wright. Malheureusement, la baie de Wright semble inconnue de tous et, avec les précieuses indications de Parks, on pourrait placer la carrière n'importe où entre le pont de la Chaudière et l'embouchure de la Gatineau.


Topographie

J'avais entrepris ce projet en partie afin d'élucider la nature d'accidents de terrain sur le territoire du Vieux-Hull, ou de l'ïle-de-Hull, délimité par la rivière des Outaouais et la ruisseau de la Brasserie. De ce point de vue, mon travail s'est avéré un échec. Des pâtés de maisons, des bâtiments et installations industrielles ou commerciales, des parcs, des parking, des terrains ± vagues et une autoroute ont totalement oblitéré les vestiges des excavations. Rien ne se comble et se nivelle plus facilement qu'une carrière abandonnée...

Deux exceptions : l'insignifiante et éphémère G6B, [en dehors de la carte de Wilson, au N de l'intersection des boul. St-Raymond et Cité-des-Jeunes] à qui nous sommes redevables de la présence d'un marécage, et la carrière de la Canada Cement (W4). (Voir, à son propos de cette dernière, cette page du site Les Trésors du Patrimoine et les liens connexes.)

Les dénivellations qui m'avaient intriguées s'expliquent sans doute par le relief original de la ville de Hull et de son plateau calcaire (plate-forme du Saint-Laurent). Des escarpements, des fossés, sont visibles sur d'anciennes cartes du Vieux-Hull et l'urbanisation n'a pas toujours réussi à niveler ces irrégularités. N'oublions pas les petits lac Flora et Minnow, asséchés, et les zones marécageuses qui leur étaient associées. Mais ceci est un autre sujet sur lequel je reviendrai. J'avais aussi pensé que les flancs de la vallée du ruisseau de la Brasserie, qui s'étagent en terrasses successives, avaient été remodelés par l'excavation de la roche. Il semble bien que non.


Listes des carrières

Sauf mention contraire, les carrières étaient actives à l'époque où elles ont été étudiées. Les correspondances des mêmes carrières d'un auteur à l'autre sont données dans le second billet du 6 juillet 2013 (lien plus haut).

Parks (1916)

  • P.1. Wright and Company, Hull, 240 x 120 m 
  • P.2. Wright and Company, Hull (+ petites carrières au N) 
  • P.3. Wright and Company, Hull 
  • P.4. A. Morin, Hull 
  • P.5. M. Lefèbre, Hull 
  • P.6. David Laviolette, Hull 
  • P.7. Joseph Leduc, Hull 
  • P.8. Fleming Dupuis Supply Co., Ottawa, 120 x 60 m 
  • P.9. Canada Cement Company, Hull, 90 m x 400 m

Goudge (1935)

  • G1. Wright Crushed Stone Co, Ltd., Hull 
  • G2. Laurentian Stone Co., Ltd., Ottawa 
  • G3. Oscar Noël, Hull 
  • G4. Abandonnée 
  • G5. Canada Cement Co., Ltd., Montréal, 210 x 150 m 
  • G6A. Napoléon Tremblay, Hull
  • G6B. Abandonnée ; terrain : William Dennison, Hull 
  • G7. Abandonnée

Uyeno (1974)

  • U3. Carrière désaffectée («extensive filling») 
  • U4. Canada Cement 
  • U5. Carrière désaffectée 
  • U6. Carrière désaffectée 
  • U9. Excavation 
  • U9A. Carrière abandonnée
  • U9B. Tranchée voie ferrée 
  • U10. Carrière? désaffectée 
  • U11. Carrière? désaffectée 
  • U12. Carrière désaffectée. («Being actively filled in 1961.»)

Hogarth (1975)

  • H1. McKay (1826)

Ells et Ami (1901)

  • E1
  • E2

Wilson (1938) : les excavations des carrières sont visibles sur la carte

  • W1.
  • W2.
  • W3.
  • W4.
  • W5.


    Références

    • Anonyme, ca 1942 — Inventaire des ressources naturelles du comté municipal de Hull — 1942, Section de l'enquête économique, ministère de l'Industrie et du Commerce, province de Québec, E-25-45.
    • Ells R.W., Ami H.M., 1901 - Geological map of the city of Ottawa and vicinity, Ontario and Quebec. Commission géologique du Canada, carte 714, échelle : 1:63 360.
    • Goudge, M.F., 1935 – Limestones of Canada, Their Occurrence and Characteristics; Part III. Canada Mines Branch, Report 755, 278 pages, with maps 756 (Montréal) and 757 (Southern Québec) in pocket.
    • Hogarth, D.D., 1975 – Pioneer mines of the Gatineau Region, Quebec. Town Beavers, Publishers Reg'd, 44 p.
    • Parks, Wm.A., 1916 — Rapport sur les pierres de construction et d'ornement du Canada, vol. III, province de Québec. Ministère des Mines, Division des mines, rapport 389, 405 p.
    • Uyeno T.T., 1974 – Conodonts of the Hull Formation, Ottawa Group (Middle Ordovician), of the Ottawa-Hull area, Ontario and Québec. Commission géologique du Canada, Bull. 248.
    • Wilson, A E, 1938 – Ottawa Sheet, East Half, Carleton and Hull Counties, Ontario and Quebec. Commission géologique du Canada, carte 413A, 1 feuille (1/,63 360).

    dimanche 23 juin 2013

    Hors sujet : message lapidaire


    Lieu de la découverte
    Piste cyclable à Gatineau (Québec), à l'ouest de la promenade du
    lac des Fées, près du viaduc du boulevard des Allumettières (juillet 2009).


    La découverte
    L'objet photographié in situ, tel qu'il m'est apparu,
    dans le gravier près de la piste.


    Gros plan (flou et grossier)
    L'objet déplacé pour être photographié dans de
    meilleures conditions. Longueur approx. : 5 cm.


    Message banal quant à son contenu, mais incongru quant à son support et son moyen de diffusion – une pierre anguleuse qui, visiblement, n'a pas beaucoup roulé.

    Dans sa simplicité, le message ne laisse pas d'être énigmatique. «MDT» : est-ce le signataire ou le destinataire de cette missive ?

    Est-ce que quelqu'un dans la région, Petit Poucet pervers, règle ses comptes en semant de tels messages lapidaires tout le long de son chemin ?

    Si ce message est unique, comme je le crois – je n'en ai pas trouvé d'autres dans les environs –, il y avait si peu de chance d'être remarqué que j'ai presque l'impression de trahir un secret en diffusant ces images.

    En effet, quelles étaient les probabilités que, passant par là, je m’arrête précisément à cet endroit, que j'examine le crushed stone au sol, que je remarque ce cailloux gris parmi d'autres cailloux gris et que je me donne la peine de me pencher pour le ramasser ?

    Tout simplement infinitésimales.

    J'ai remis le gravier à sa place en partant. Après tout, il ne m'était pas destiné.



    Gros plan raffiné
    (Accentuation et contraste retouchés pour meilleure lisibilité.)

    mardi 11 juin 2013

    Veine de mica à Perkins (Québec)


    Une étrange veine de mica recoupe un granite, rue des Aigrettes, à Perkins (Val-des-Monts, Québec). On a un peu l'impression de quelque chose de fluide qui se serait immiscée à travers le socle en emportant des fragments de roches en progressant. J'avoue ne rien oser affirmer de façon trop péremptoire...

    Toutes les photos : 9 juin 2013.

    Contexte géologique : roches de la province de Grenville, division du Bouclier canadien ayant entre 1,3 et 1 milliard d'années.


    Photo 1.
    Photo 1. Spectaculaire veine de mica noir (biotite ?) recoupant un granite rose, lequel recoupe des gneiss rubanés (photo 8). Pas très photogénique, je l'avoue... Certains cristaux de mica atteignent plus de 20 cm (au centre de la photo).


    Photo 2.
    Photo 3.
    Photos 2 et 3. Des éclats ou des yeux disloqués de quartz blanc (granite ? quartzite ?, les deux abondent dans le secteur) sont contenus ou charriés dans la veine. Le mica épouse la forme de l'inclusion et s'est infiltré dans les fractures.


    Photo 4.
    Photo 4. Le tout présente l'aspect d'un conglomérat à matrice micacée. Voyez le «galet» arrondi en haut, à gauche du centre de la photo (voir photo 6). Largeur de la surface photographiée : 30 cm.


    Photo 5.
    Photo 5. Détail de 4 ; des cristaux xénomorphes ou idiomorphes sont charriés dans la masse de mica. Certains sont brisés et anguleux. Je regrette de ne les découvrir que sur photos, il aurait été plus facile de les identifier in situ. Étant un médiocre minéralogiste, j'invite les connaisseurs à donner leur opinion...


    Photo 6.
    Photo 6. Détail de 4 ; inclusion arrondie, érodée par le transport dans la veine, ou pseudo-galet ?


    Photo 7.
    Photo 7. Dyke rectiligne de quartz recoupant un gneiss, quelques dizaines de m au sud. Ça semble, avec ses rares cristaux de feldspath rose, le même que celui des xénolithes de la veine de mica : coïncidence ?


    Photo 8.
    Photo 8. La roche hôte du granite et de la veine : paragneiss rubané local, de l'autre côté de la rue, face à la photo 1.

    samedi 8 juin 2013

    Chutes des Chaudières : voir la suite


    J'ai prolongé d'un «Ajout» le billet «Chutes des Chaudières : description et origine», risquant ainsi de le faire ressembler à une courte-pointe rapiécée. Disons que la continuité se fait au détriment de la cohérence, au fil de mes découvertes (qui ne sont souvent des découvertes que pour moi). Le fer à repasser de la synthèse viendra un jour aplanir les faux plis...

    Voici un petit avant-goût de la mise à jour, avec vue sur le glissoir du chenal entre les îles Victoria et Amelia, à Ottawa.

    Suivez le lien (plus haut) pour en savoir davantage.


    Chenal et glissoir entre l'île Amelia (à gauche) et l'île Victoria (à droite). Au centre de l'œuvre, une chute, raison d'être du glissoir. Le bâtiment gris est l'actuel Mill St. Brew Pub (2012), installé dans ce qui était à l'époque le moulin à papier Thompson-Perkins & Bronson, sur l'île Amelia (1842). Il s'agit du plus vieux moulin subsistant à d'Ottawa (photos plus bas).
    Alice Mary Fulford, Glissoire à bois et radeau, à Bytown, ca 1851, aquarelle sur crayon avec raclage, 28 cm 18 cm. Bibliothèque et Archives Canada, no d'acc 1970-188-2152, No MIKAN 2897312


    La chute dans son état actuel (panneau sombre). Elle était «fermée» au moment ou la photo a été prise. (Mai 2013)


    Pas beaucoup d'eau «ne chute», c'était pourtant la crue printanière. (Mai 2013)


    AJOUT (25 oct. 2014). — En fait, la chute déborde du haut d'une écluse fixe (le «panneau sombre» des photos du billet) ; la dénivellation réelle, sans l'écluse, est beaucoup moins grande. Voir le billet du 25 oct. 2014, photos 9-10 ; il est clair que le chenal qui mène à l'écluse a été régularisé et que, en amont de celle-ci, une couche de calcaire, dont l'épaisseur est difficile à évaluer avec exactitude, a été enlevée. Bref, il y avait, il y a encore un seuil rocheux à l'endroit de l'écluse (ou du panneau sombre).


    Même site, angle différent. «Bec verseur», à droite, là où débouchait le glissoir. (Avril 2013)


    (Avril 2013)


    Ajout (15 juin 2013). – Finalement, la chute est «ouverte».